Site icon SUPERBE MEDIA

RENCONTRE avec SIMIA : « La musique me permet d’être à la fois moi-même et la personne que j’ai envie d’être face aux autres. »

Simia est un rappeur originaire du 13ème arrondissement de Paris, ayant vécu une partie de sa vie au Canada. En passant par ses influences, ses motivations dans la musique ou encore sa vision de la famille, rencontre avec…

Bonjour Simia, peux-tu te présenter aux lecteurs de Superbe qui ne connaîtraient pas ?

Salut, je suis Simia, ou Matthieu, c’est comme on veut. Je viens de Paris 13e et je fais du rap, ou en tout cas de la musique qui s’en rapproche, depuis quatre ou cinq ans.

Quelle est l’origine de ton blase ?

Comme tous les gars qui se décident à faire du rap, il y a un moment où la question du pseudonyme se pose. Pour ma part, je me souviens très bien de comment ça s’est passé. J’ai des origines russes et je voulais les mettre un peu en avant à travers mon nom de scène. Le problème c’est que je ne parle pas du tout la langue, j’ai donc demandé à ma meilleure amie qui m’a introduit dans le rap comment on disait le mot « famille » en russe. Je voulais symboliser ce qui me rassure et ce qui me donne confiance dans ce projet, c’est-à-dire la famille, au sens large, en incluant mes potes et tous les gens qui font partie de ce projet. Voilà ce que veut dire Simia.

Lors de tes débuts, tu étais en partie à Montréal. Est-ce le fait d’être au Canada qui t’as donné envie de t’investir dans la musique ?

Ca a joué un grand rôle dans mon envie d’aller un peu plus loin. Je suis parti au Québec pour mes études mais c’est plutôt la musique que j’ai développé là-bas. J’ai rencontré un tas de personnes incroyables qui font toujours partie de ce projet. Yaska qui signe trois prods. et qui a mixé et enregistré l’EP, QuietMike qui signe la prod. de “Spécial” entre autres, Ségolène Richard qui a été ma première manageuse et qui m’a fait beaucoup jouer à Montréal. Ce sont des gens dont je suis toujours proche aujourd’hui, qui font partie de ce projet. La vibe de Montréal et du Canada a été déterminante aussi, parce que c’est une autre façon de voir la musique. Ça va beaucoup plus vite, on te pose beaucoup moins de questions sur ta légitimité à faire du son. Si t’es bon et que tu te débrouilles bien tu rencontres pleins de gens et tu avances vite. Les sonorités des prods. et l’ambiance de travail en studio sont folles là-bas, nous passions nos nuits dans des appartements où il n’y avait rien à part un ordinateur portable, de grosses enceintes et un micro dans le placard.

Ton rap est-il influencé par la scène canadienne ?

Oui d’une certaine manière. Après je viens beaucoup et avant tout du rap français, dans le sens où j’aime faire passer un message, mes premières inspirations restent Oxmo Puccino, Lunatic, Rocé, Fabe ou Mos Def, The Roots. Cependant, Montréal m’a décomplexé je pense. Les gars, là-bas, sont beaucoup plus dans la vibe et finalement c’est ce qui compte, c’est de la musique au fond. Du coup j’essaie d’équilibrer les deux maintenant et c’est clairement mon expérience là-bas qui a joué là-dedans.

Tu as été Lauréat du Buzz Booster Île-de-France, quel en a été l’impact pour toi ?

Ça a été un événement déclencheur pour moi. Je me suis inscrit un peu par hasard au Buzz Booster. Je revenais de Montréal et je n’avais pas tellement de plans à Paris. J’accusais un peu le coup. Je traversais un période un peu difficile à ce moment. Le fait d’avoir remporté toutes les étapes à Paris m’a donné de la confiance. J’ai commencé à rencontrer des personnes du milieu, et petit à petit je me suis dit qu’il y avait peut-être un truc à faire avec la musique, c’est devenu concret.

Lorsque l’on écoute tes premiers morceaux d’ il y a plus de deux ans, et ceux sortis récemment, on remarque une différence autant dans les sonorités que dans les textes, peux-tu nous expliquer cette évolution ?

Il y a eu un véritable tournant vers l’hiver 2018. Je me suis pas mal remis en question sur mes choix, il a fallu que je me recentre sur ma vie. La musique a clairement été au centre de ça. J’ai commencé à écrire des morceaux plus personnels et un peu plus introspectifs sur ma vie. C’est de là qu’a jailli l’EP “Spécial“, qui dénote avec tout ce que j’ai fait avant en étant beaucoup plus proche de moi et plus sincère. Je ne voyais pas forcément la musique comme un moyen de réflexion avant ça.

Dans ton morceau “Spécial“, je cite : “Il n’y a que sur scène que je me sens bien, et puis tout s’arrête et je deviens lucide.” Est-ce que faire du rap est pour toi une manière de te sentir bien, un exutoire ?

C’est absolument ça et presque que ça je pense. La musique me permet d’être à la fois moi-même et la personne que j’ai envie d’être face aux autres. C’est moi qui décide et c’est ça que j’aime, personne n’a son mot à dire sur ça. Et cette phrase fait référence à ça. Au fait que ce que les gens voient de moi, c’est que ce que je veux leur montrer et en même temps, je dis des choses très personnelles donc c’est dangereux, l’expression “redevenir lucide” fait référence à ça. C’est se demander si je me sens vraiment bien en racontant mes problèmes à tout le monde.

Justement, en quoi Simia est spécial ?

Très bonne question. C’est un peu tout le sens de ce titre et ce que je développe dans l’EP. Être spécial c’est être soi-même et c’est ce que je voulais atteindre avec ce projet, c’est pour ça que je l’ai appelé comme ça. Ce n’est pas être spécial par rapport aux autres, mais se rappeler qu’on est unique, qu’on est comme ça et qu’il faut l’accepter pour être bien dans une époque et un monde où tout est standardisé et où tout le monde se compare tout le temps pour être le meilleur. Être spécial c’est l’être pour soi. Ni être mieux, ni être comme tout le monde. Par exemple, tu vas voir que je parle un peu différemment de mes histoires d’amour, peut-être de manière un peu sensible, où je laisse un peu parler mes failles là où le premier réflexe dans le rap est de faire le bonhomme. J’ai essayé de faire ça et ça n’a pas fonctionné. Donc autant en parler comme je le vis.

Ton premier projet sort dans moins d’un mois, à quoi va t-il ressembler ?

À moi, j’espère. Autant dans les textes que dans les sonorités que j’ai cherché à développer, j’ai voulu que ce projet soit un miroir de ce que je suis, de ce que j’ai vécu et de ce que je veux. Donc il est paradoxalement à la fois triste et assez optimiste.

Tu travailles beaucoup avec la Soixante-Quinzième Session et Sheldon, est-ce eux qui ont donné la couleur musicale aux prods. de ton projet ?

Je bosse avec Sheldon depuis plusieurs années, c’est clairement un des piliers de ce projet, je le big-up au passage. Au-delà des prods. qu’il signe sur “Spécial” (Moteur, Point Mort, 100 fois), c’est un mec en or qui s’investit à 200% dans les projets sur lesquels il bosse. Il m’a énormément conseillé sur les mélodies, les façons de faire sonner ma voix etc. On a réfléchi ensemble, avec Yaska et lui sur la couleur du mixe, du master qu’on a donné au projet. Après, j’ai bossé avec d’autres producteurs, l’idée avec ce projet était de choisir vraiment moi-même la couleur que je voulais.

As-tu prévu de défendre ton projet sur scène après sa sortie ?

J’y compte bien, la scène il y a que ça qui compte. Je serai à la Boule Noire le 19 octobre (concert gratuit), et une release party aura lieu le 21 novembre au 1999 dans le 11e.

Avant ta carrière solo, tu avais un groupe de rap, Millipstonimia, où en est ce projet ?

Tu es bien informé ! Millipstonimia c’était vraiment les prémisses de tout, c’est l’origine de ma musique. C’est un groupe qu’on a monté avec Ellips dont je te parlais tout à l’heure et Miles Tone. On a fait quelques morceaux, pas mal de petites scènes dans des bars, c’est vraiment avec eux que j’ai fait mes armes. Ils ont arrêté la musique depuis, je suis le seul survivant mais ça reste la famille.

Le Média Superbe parle de la culture urbaine française, mais aussi de vêtements. Portes-tu une attention particulière à la manière dont tu t’habilles dans ta carrière musicale ?

Oui, c’est essentiel pour moi. Je porte beaucoup d’attention sur le stylisme de chacun des clips, de chacune des scènes. Comme tu as pu le voir, sur le dernier clip « Spécial », j’ai travaillé avec la styliste Camille Guérard qui a fait un boulot incroyable. je tiens vraiment à ce que mes vêtements reflètent qui je suis et on a la chance en France d’avoir énormément de créateurs talentueux, je pense par exemple à Tant d’Avenir pour les bijoux, que t’as aussi pu voir dans quasiment tous mes derniers clips.

Peux-tu nous citer tes marques françaises de prédilection ?

Je commence par Tant d’Avenir, d’autant plus que c’est un ami d’enfance, et au niveau des sapes j’aime beaucoup Wasted, Rimbaud font des trucs fous, la créatrice Yuchieh Jess, et encore plein d’autres.

En quoi est-ce que Simia, #CESTSUPERBE ?

Ce qui est Superbe c’est la manière dont on a bossé ce projet, l’équipe incroyable avec qui je bosse (c’est ma famille carrément) : Earvin, Ivan, Mélie, Alma, Otsu, Yaska, Sheldon, et tous ceux qui m’accompagnent là-dedans.

Un dernier mot ?

On se donne rendez-vous sur scène pour retourner ça.

Crédit photos  et propos recueillis par : Ill’Yo Superbe.

SIMIA SPECIAL #CESTSUPERBE